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Le blog de la section CFDT d'Axway

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vendredi 5 décembre 2014

Salariés protégés : quid des allocations-chômage en cas de réintégration?

 

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Un salarié protégé, dont le licenciement est annulé et qui obtient sa réintégration, ne peut cumuler l’indemnisation perçue à ce titre et les allocations chômage servies entre le licenciement et la réintégration. C’est ce que vient de rappeler la Cour de cassation dans un arrêt du 19 novembre 2014 qui sera publié à son rapport annuel. Cass.soc, 19.11.14, n°13-23643.

Dans cette affaire, un salarié protégé obtient sa réintégration suite à un licenciement nul, car intervenu sans autorisation de l’inspecteur du travail. Il obtient également la condamnation de l’employeur à lui verser une indemnité équivalente aux salaires du jour de son licenciement jusqu’à sa réintégration.

Suite à cela, il accède à la demande de Pôle emploi qui lui réclame le remboursement des allocations-chômage perçues sur la période entre le licenciement et sa réintégration. Puis il décide d’assigner Pôle emploi en répétition de l’indu devant le Tribunal de grande instance.

Il est débouté de sa demande par les juges du fond et saisit la Cour de cassation du litige.

Selon le salarié, la nullité du licenciement ne peut le priver, rétroactivement, de son droit à l’allocation-chômage qui lui a été versée entre son licenciement et sa réintégration. Il considère que cela est d’autant plus exact dès lors qu’il remplissait les conditions de versement de l’allocation : privé involontairement de son emploi et apte et à la recherche d’un travail.

La Cour de cassation a donc dû trancher la question suivante : le salarié protégé qui obtient sa réintégration et l’indemnisation en découlant peut-il conserver le bénéfice des allocations-chômage perçues pendant la période entre le licenciement et la réintégration ?

La Cour de cassation répond sans détour, et confirme la solution dégagée par un arrêt vieux de 2009(1) : en cas de nullité du licenciement du salarié protégé, le cumul entre les allocations-chômage et les rémunérations, ou indemnités équivalentes, est impossible.

La Cour de cassation explique en effet que le paiement des allocations-chômage se révèle indu sur la période entre le licenciement et la réintégration lorsque le salarié obtient la condamnation de l’employeur à lui verser une indemnité compensatrice de salaire pour la période concernée.

Cette solution peut paraître assez logique de prime abord, sur le fait qu’il n’est pas possible de cumuler un salaire (ou indemnités équivalentes) et des allocations-chômage, mais elle soulève quelques interrogations.

Comme le fait justement remarquer le salarié, ce dernier remplissait les conditions d’octroi des allocations-chômage pendant toute la période en question : il était privé involontairement de son emploi, apte et à la recherche d’un emploi. Pourquoi alors lui priver rétroactivement de ses allocations-chômage perçues ?

De plus, ce n’est pas lui qui est à l’origine du licenciement nul, mais il subit en quelque sorte une double peine :

-      dans un premier temps, licencié, il est à la recherche d’un emploi,

-      puis dans un second temps, il obtient sa réintégration et le paiement des sommes en découlant, mais doit restituer les allocations alors perçues « justement ».

On peut regretter ici que le remboursement des allocations-chômage versées entre le licenciement et la réintégration ne soit pas mis à la charge de l’employeur, dans la mesure où c’est lui qui est à l’origine du licenciement nul. Il aurait été juste qu'il en supporte toutes les conséquences.  

Dans une situation certes différente, celle du licenciement économique et de la convention de reclassement personnalisé, la Cour de cassation retient cette solution : en l'absence de motif économique, la convention de reclassement personnalisé devenant sans cause, l'employeur est tenu de rembourser les indemnités de chômage éventuellement versées au salarié(2).

 

(1) Cass.soc.09.10.89, n°87-18177.

(2) Cass.soc, 12.06.12, n°10-14632.

http://www.cfdt.fr/portail/le-carnet-juridique/fil-d-actualites/salaries-proteges-quiddesallocations-chomage-encasdereintegration-srv2_236649

samedi 29 novembre 2014

Le moral des ménages français remonte un peu en novembre

 

Le moral des ménages français s’est un peu amélioré en novembre, a annoncé mercredi l’Insee, qui avait déjà fait état la veille d’un regain d’optimisme de la part des entreprises.

L’indicateur mesurant la confiance des ménages français a grimpé de 2 points en novembre, à 87 points selon l’Insee. Il s’agit du plus haut niveau depuis mars.

L’Institut national de la statistique et des études économiques a toutefois précisé que cet indicateur restait nettement inférieur à sa moyenne de longue période, soit 100 points.

L’Insee pose chaque mois à environ 2.000 ménages plusieurs questions pour calculer cet indicateur, à la fois sur leur situation personnelle et sur leur avis à propos de la conjoncture en général.

En novembre, les Français se sont ainsi dit plus optimistes sur leur situation financière future (+2 points), et davantage disposés à faire de gros achats (+4 points).

Par ailleurs, l’opinion des ménages sur le niveau de vie passé en France a fortement rebondi (+7 points) après cinq mois de baisse, atteignant son plus haut niveau depuis plus de deux ans. Celle sur le niveau de vie futur s’est également redressée (+2 points).

Ce regain d’optimisme ne va toutefois pas jusqu’à prévoir une embellie de l’emploi: la proportion de ménages considérant que le chômage va augmenter a encore légèrement progressé (+2 points).

Mardi, l’Insee avait déjà annoncé que le climat des affaires en France s’était amélioré en novembre dans l’ensemble des secteurs économiques, progressant de trois points par rapport au mois précédent, pour attendre 94 points soit le plus haut niveau depuis juin.

Source AFP

samedi 18 octobre 2014

Chômage des jeunes

 Chômage des jeunes : sans diplôme du supérieur, le risque multiplié par cinq

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mardi 12 août 2014

Le rapport Lacabarats : 45 propositions pour un "tribunal prud’homal du XXIème siècle"

 « Vers un tribunal prud’homal du XXIème siècle » : Les idées force du rapport Lacabarats

PUBLIÉ LE 24/07/2014 À 17H34par Service juridique - CFDT

 

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En mars dernier, la CFDT était auditionnée à la Cour de cassation par le premier président de la chambre sociale de la Cour de cassation, Monsieur Lacabarats. Le rapport qu’il avait pour mission d’établir a finalement été remis à Christiane Taubira le 16 juillet dernier. Il aborde, à sa façon, les difficultés rencontrées par les conseils de prud’hommes et formule nombre de propositions censées y remédier. Vous trouverez ci-joint un aperçu de son contenu. Mais nous aurons, bien entendu, l’occasion d’y revenir à la rentrée de septembre … En attendant de voir comment la Chancellerie se saisira (ou pas) de la question.

Difficile de synthétiser le rapport Lacabarats tant il est riche en propositions. 45 au total !

Après une première partie où le rapporteur fait un constat sans concession (mais souvent contestable) du fonctionnement actuel des conseils de prud’hommes et de ses difficultés (notamment la longueur attenante aux délais de procédure), le rapporteur livre des propositions que nous ne pourrons pas toutes détailler ici. Mais nous tenterons, autant que faire se peut, de dégager la philosophie qui les anime et d’exprimer nos tous premiers sentiments.

Des propositions qui visent à renforcer la reconnaissance des prud’hommes au sein même de notre organisation judiciaire

En tout premier lieu, le rapporteur propose, à titre éminemment symbolique, de souligner le caractère juridictionnel des conseils de prud’hommes en les rebaptisant « tribunaux des prud’hommes » et en intégrant, dans le Code de l’organisation judiciaire et dans le code de procédure civile, les textes du Code du travail qui sont relatifs à l’organisation, à la procédure  et au fonctionnement des conseils de prud’hommes. Puis, allant dans le sens de davantage de reconnaissance mais aussi de bon sens, il envisage de permettre aux conseillers prud’hommes d’accéder « aux ressources de l’intranet justice »et de participer à des rencontres régulières avec les départiteurs, le tribunal de grande instance (TGI) et la Cour d’appel.

Cette toute dernière proposition retient d’autant plus notre attention que nous avions, nous-mêmes, lors de l’audition de la CFDT en mars dernier, mis l’accent sur ces bonnes pratiques qui, dans certains  conseils de prud’hommes, n’ont pas attendu la perspective d’une réforme pour se matérialiser.

Notons enfin que, dans cette première catégorie de proposition, l’idée de revoir la carte judiciaire et de veiller à une meilleure répartition des juges au sein des conseils de prud’hommes est aussi mise en avant. Ce, afin de permettre à ces derniers d’avoir une activité rédactionnelle minimale. Preuve si l’en était besoin que la réforme Dati, menée tambour battant en 2007, et sans concertation véritable, n’a pas été opérante.  

Des propositions qui visent à réformer en profondeur le statut des juges prud’hommes

Le rapporteur déplore ici la trop faible utilisation, par les conseillers prud’hommes, de leur droit à formation. Fort de ce constat, il plaide pour la valorisation de la formation ainsi que pour la mise en place d’une formation initiale suivie d’une formation continue.

De telles perspectives nous conviennent parfaitement bien puisque nous avions nous-mêmes poussé en ce sens, lors de notre audition. Nous notons également avec satisfaction que notre idée de saisir l’opportunité de la mise en place du nouveau système de désignation des conseillers prud’hommes pour mettre en œuvre de manière effective la formation initiale, a également été retenue par le rapporteur.

Mais tout n’est pas rose pour autant car force est de constater que le rapporteur ne conçoit la formation (initiale comme continu) que comme un apprentissage purement technique devant incomber à l’Ecole nationale de la magistrature (ENM) et qu’à l’Ecole nationale du greffe (ENG) et duquel les organisations syndicales seraient ni plus ni moins écartées. Le rapport précise, en effet, que « l’ensemble de ces formations devraient être communes à tous les juges prud’homaux ». Cette perspective, de par son caractère globalisant, est pour nous tout à fait inacceptable.

Le reste des propositions formulées sur ce point s’articulent autour de la question des droits et des devoirs des conseillers prud’hommes. Sur ce point précis, le rapporteur souhaite notamment rendre les procédures disciplinaires plus efficientes. Ce, en confiant une compétence particulière au conseil supérieur de la prud’homie. La perspective d’une telle évolution mériterait, à notre sens, d’être finement analysée et débattue.

Au  final, l’on constate que le rapporteur ambitionne de rapprocher le plus possible le statut des conseillers prud’hommes de celui des magistrats professionnels. Est-ce une chance ou un danger ? A notre sens, c’est avant tout à cette question qu’il nous faudra répondre …

Des propositions qui visent à revoir les compétences des différentes juridictions en matière de droit du travail

Les  juges professionnels ayant à traiter du droit du travail ne sont pas non plus oubliés puisque le rapporteur envisage de confier l’intégralité de ce contentieux (dont le contentieux électoral) au vice-président du tribunal de grande instance (en formation collégiale ou en juge unique selon les cas).

Dans un tel système, le juge départiteur ne serait donc plus le juge d’instance mais un juge du TGI.

Des propositions permettant de rationaliser le fonctionnement entre ordre juridictionnels (administratifs et judiciaires) mais aussi de permettre de (mieux) traiter les dossiers en série  (via la création d’une possibilité d’action collective devant le TGI) sont également formulées.

Là encore, l’ensemble de ces pistes méritaient d’être expertisées et débattues avant que nous nous positionnions définitivement.

Des propositions qui visent à rendre les procédures prud’homales plus efficientes 

Ne boudons pas notre plaisir ! Et ouvrons la présentation de cette ultime partie en signalant la présence d’une proposition qui nous fait chaud au cœur ! Nous voulons ici parler de la proposition numéro 40 qui se trouve ainsi libellée : « Créer un statut des défenseurs syndicaux ». Y est précisé que les défenseurs pourraient, notamment, disposer d’heures et que, dès lors qu’ils seraient salariés, ils pourraient prétendre à un maintien de leur rémunération … Les salaires ainsi versés devant alors être remboursés par l’Etat à l’employeur … Un peu comme cela se passe déjà pour les conseillers prud’homaux salariés.

Si une telle solution pouvait être retenue par la Chancellerie, elle constituerait l’aboutissement d’années de revendications.

Mais, le rapporteur pointe aussi ici les insuffisances de « l’oralité de la procédure » dans sa conception actuelle, eu égard notamment aux délais de procédure à rallonge. Pour y remédier, il propose, notamment, d’uniformiser l’acte de saisine prud’homale. Ce, par le biais de l’établissement  d’un formulaire de saisine qui serait valable pour l’ensemble des juridictions prud’homales sur tout le territoire. Ce qui parait pertinent puisqu’à l’heure actuelle, chaque conseil de prud’hommes dispose de son propre formulaire.

Plus intéressante encore est la proposition qui consiste à permettre aux conseils de prud’hommes de délivrer, eux-mêmes, les attestations nécessaires à l’inscription à Pôle emploi. Ce qui résoudrait nombre de problème d’exécution des décisions prud’homales qui en ordonnent la délivrance. Mais reste alors à savoir si cela sera aussi évident que ça à mettre en œuvre.

L’idée d’un renforcement des pouvoirs de conciliation alloués au bureau de conciliation mérite, lui aussi, d’être regardé de près ! Cependant, une telle évolution nécessiterait qu’à hauteur de conciliation, le dossier soit un minimum constitué. C’est d’ailleurs, en ce sens, que le rapporteur propose que, dès la saisine, pèse sur le demandeur, une nouvelle obligation. Celle de « préciser sommairement  l’objet de sa demande avec un résumé des moyens de fait et de droit et l’indication des faits sur lesquels il fonde sa demande ». Là encore, de telles évolutions mériteraient d’être débattues afin de voir quels en seraient les conséquences pour le justiciable salarié.

Mais le rapporteur ne s’arrête pas là puisqu’il envisage également d’impacter le bureau de conciliation dans son champ de compétence juridictionnelle. Ainsi est-il envisagé de donner capacité au bureau de conciliation de juger sur le fond en cas de défaillance du défendeur. L’idée est bonne puisque, à l’évidence, elle serait de nature à dissuader l’employeur de déserter la conciliation et, ce faisant, de rallonger la procédure. Pour autant, cela ne pose-t-il pas un problème de compétence ? Est-il vraiment souhaitable que le bureau de conciliation dispose ainsi d’un pouvoir juridictionnel à ce point étendu ? Le fait de voir son affaire entendu par une formation nécessairement restreinte (à deux juges) est-il totalement neutre pour le justiciable ? Toute une série de questions qui, là encore, mériteront d’être débattues.

Mais par-delà le stade de la conciliation, le rapporteur propose qu’une procédure de mise en état digne de ce nom et officiellement reconnue puisse voir le jour. Nous n’avons, bien entendu, pas d’opposition de principe sur ce point puisque, comme nous l’avions fait remonter lors de notre audition, nombre de conseils de prud’hommes tentent aujourd’hui de mettre en place, avec les moyens du bord, des procédures de cette nature. Reste, bien entendu, à voir comment des modalités réellement impératives pourraient être mises en place tout en tenant compte des spécificités des conseils de prud’hommes.  Ce d’autant plus que le rapporteur n’envisage pas de supprimer la notion d’unicité de l’instance mais seulement de l’aménager.

S’agissant du recours au départage, le rapporteur propose que la décision le concernant puisse dresser la liste des « interrogations en suspens ». L’idée mériterait surement d’être creusée dès lors que cela contribuerait à rationaliser le recours  au départage. Dans la même veine, il propose aussi de rendre davantage possible la présence des juges prud’homaux composant le bureau de jugement lors de l’audience de départage.

S’agissant du rendu des décisions prud’homales, le rapporteur préconise qu’elles soient mises à la disposition du justiciable le jour même du prononcé avant de pouvoir être très rapidement notifiées aux parties. 

S’agissant enfin des voies de recours, le rapporteur propose de rendre la représentation des parties obligatoire en appel. Cette piste mérite d’être étudiée. D’abord, parce qu’aller seul en appel n’est pas un gage de succès. Ensuite, parce que cette proposition se trouve « couplée » avec celle qui vise à faire reconnaitre un statut pour les défenseurs.

Pour conclure, nous signalerons la présence, dans le rapport, d’une proposition qui ne nous convient absolument pas puisqu’elle serait de nature à réintroduire l’idée d’une possible forfaitisation des dommages intérêts auxquels le justiciable peut prétendre. Le rapporteur propose que sur des dossiers considérés comme « simples », les parties puissent choisir une voie de traitement rapide de leur dossier avec à la clef une indemnisation forfaitisée. Dit autrement, il s’agirait d’un deal « Célérité contre moindre indemnisation », ce qui ne serait tout sauf équitable. Nous sommes, bien entendu, d’accord pour œuvrer à l’avènement de procédures (beaucoup) plus rapides … mais pas au dépend de la qualité et de l’égalité entre justiciables !

Vous l’aurez compris, cette brève (un peu longue) n’est pas une analyse ni exhaustive, ni définitive.  Elle se veut le reflet de nos premières impressions de lecture d’un rapport important qui vient tout juste de nous parvenir et dont nous ne souhaitions pas attendre la rentrée pour les partager avec vous.  

Avec la rentrée, viendra le temps des échanges et des débats et peut-être de l’esquisse des premières intentions de la Chancellerie. Pour l’heure la garde des Sceaux a déjà pu préciser que si les propositions de ce rapport « ne pouvaient être reprises dans leur intégralité », elles n’en constituaient pas moins « un riche matériau pour réformer les juridictions prud’homales ».

 

Le temps venu, nous pèserons dans le débat pour que toute réforme, quelle qu’elle soit, soit parfaitement conforme aux intérêts des justiciables.


vendredi 25 juillet 2014

Listes électorales : en cas de conflit la fédération prime sur le syndicat

 

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Dès lors qu’une fédération informe l’employeur de sa volonté de déposer une liste en lieu et place des syndicats qui lui sont affiliés, ce dernier peut écarter d’office les listes présentées par ces syndicats sans avoir à saisir le juge. Telle est la précision apportée par un arrêt de la Cour de cassation. Cass.soc. 04.06.14, n° 13-60238.

  • Les faits

En vue du renouvellement des institutions représentatives du personnel dans une entreprise, deux listes ont été déposées le même jour :

-          Celle d’un syndicat, affilié à sa fédération syndicale

-          Celle de la fédération, précisant qu’elle venait en remplacement des listes déposées par les syndicats qui y sont affiliés.

Conformément aux instructions de la fédération, l’employeur a décidé d’écarter la liste déposée par le syndicat. Ce dernier a saisi le tribunal d’instance pour demander l’annulation des élections.

Les juges du fond ont fait droit à cette demande en considérant que l’employeur ne pouvait pas se faire juge de la validité des candidatures présentées sur le seul fondement des instructions de la fédération et qu’il aurait dû les contester devant le juge d’instance. Pour résumer, l’employeur aurait dû faire preuve de neutralité.

Ce n’est pourtant pas la solution retenue par la Cour de cassation : elle considère que dès lors que la fédération a informé l’employeur qu’elle déposait une liste « au lieu et place des syndicats qui lui sont affiliés », ce dernier était autorisé à « ne pas retenir les listes présentées par les syndicats » et ce, sans avoir à saisir le tribunal d’instance.

OBLIGATION DE NEUTRALITÉ DE L'EMPLOYEUR

 

  • Une entorse au principe de neutralité ?

Le principe de neutralité est un des principes essentiels du droit électoral qui, en cas de non-respect, peut constituer une cause d’annulation des élections.

C’est en vertu de ce principe que les juges du fond ont considéré que l’employeur ne pouvait pas, sur instruction émanant d’une partie, décider seul d’écarter une liste. La jurisprudence allait déjà en ce sens (1).

Ici la Cour de cassation apporte un tempérament au principe de neutralité : l’employeur peut d’office écarter une liste déposée par des syndicats si la fédération à laquelle ils sont affiliés a précisé qu’elle était la seule qualifiée pour déposer une liste. 

Cette entorse au principe de neutralité reste toutefois encadrée puisqu’elle suppose que la fédération se soit prononcée sur la structure habilitée à candidater et qu’elle en ait informé l’employeur. On imagine qu'à l'appui de ses instructions, la fédération a fourni les éléments permettant à l'employeur de vérifier la réalité de ce qui est avancé (ex: statuts, réglement intérieur, organisation interne de l'organisation syndicale)

C’est seulement en l’absence de précisions apportées par la fédération, que l’employeur devra s’en remettre au juge.

  • Rôle accru de l'employeur?

Si l’employeur n’est pas juge de la régularité des candidatures, il a progressivement été autorisé, dans certains cas, à écarter seul des candidatures : dépôt de liste hors délai fixé par le protocole d’accord préélectoral(2), retrait de candidature (3).

Par exemple, dans un arrêt de 2013 (4), la Haute Cour avait déjà apporté une exception au principe  en permettant à l’employeur d’écarter, sans intervention du juge,  la candidature  d’un délégué syndical déposée au nom de son organisation,  à condition d’avoir vérifié auprès de l’organisation syndicale, que le délégué n’avait effectivement pas reçu mandat pour déposer une liste.

Cet  arrêt  étend donc les pouvoirs dont il dispose à l’occasion des élections professionnelles, mais quelle est  la portée du  contrôle que l’employeur doit exercer, lui qui voit en principe son rôle cantonné à celui d’une police des élections professionnelles ?

On peut aussi s’interroger sur la portée de cette solution en matière de conflits internes aux organisations syndicales. En l’espèce, il s’agit d’un conflit de listes  mais la solution pourrait-elle s’étendre à d’autres attributions inhérentes à la représentativité, telle que la désignation de délégués syndicaux ou la signature d'accord collectif en cas de désaccord entre structures?

Qu’en serait-il d’un conflit opposant une confédération et une de ses fédérations ? La Cour de cassation pourrait être amenée à préciser les choses prochainement.


(1) Cass.soc. 10 décembre 1986, n° 86-60297 : l’employeur, qui n’est pas juge de la validité d’une candidature, ne peut refuser celle d’un salarié sans décision préalable du tribunal d’instance.
(2) Cass.soc., 9 novembre 2011, 10-28838
(3) Cass.soc., 5 mars 1997, n° 96-60034
(4) Cass.soc. 30 octobre 2013, n° 12-29.952

vendredi 27 juin 2014

Liberté religieuse : point final à l’affaire Baby-Loup

 

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L’Assemblée Plénière de la Cour de cassation a finalement validé le licenciement dans l'affaire Baby-loup, confirmant qu'une crèche privée peut imposer, sous certaines conditions, à sa salariée en contact avec de jeunes enfants de retirer son voile. Une décision en contradiction avec celle que cette même Cour (dans une autre formation) avait rendue il y a plus d'un an. Cass. soc. 25.06.14, n°13-28369.

« Baby Loup » est une association dont l'objet est l’accueil de la petite enfance. Le règlement intérieur de cette crèche prévoit que « Le principe de liberté de conscience d'opinion et de religion de chacun des membres du personnel ne peut faire obstacle au respect des principes de laïcité et de neutralité qui s'appliquent dans l'exercice de l'ensemble des activités développées par la crèche. »  En 2008, une des éducatrices, de retour de congé parental, se présente voilée sur son lieu de travail. À l'appui du règlement intérieur, l’employeur lui demande de retirer son voile. Refusant d'obtempérer, la salariée se voit licenciée et enclenche une action judiciaire pour faire reconnaître son droit à porter le voile.

Il serait erroné de dire que cet arrêt remet en cause la liberté religieuse en entreprise privée. La Cour de cassation donne toutefois une interprétation plus souple qu’auparavant des conditions dans lesquelles il peut être porté atteinte à cette liberté dans le règlement intérieur d’une entreprise privée.

  • Légalité du règlement intérieur

En combinant les articles L1121-1 et L.1321-3 du Code du travail, la Cour rappelle le principe selon lequel : « les restrictions à la liberté du salarié de manifester ses convictions religieuses doivent être justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché ». Le règlement intérieur qui interdit le port de signe religieux doit donc respecter ce double principe pour être légal et non discriminatoire.

Il y a 15 mois de cela, dans un précédent arrêt du 19 mars 2013, la Cour de cassation avait estimé que cette clause « instaurant une restriction générale et imprécise de la liberté religieuse, ne répondait pas aux exigences de l’article L. 1321-3 du Code du travail. » Par conséquent, le licenciement avait été jugé nul, car fondé sur un motif discriminatoire.

La haute Cour, réunie en Assemblée Plénière cette fois, semble avoir changé d’opinion sur le contenu de ce règlement intérieur puisqu’elle juge désormais que: « la restriction à la liberté de manifester sa religion édictée par le règlement intérieur ne présentait pas un caractère général, mais était suffisamment précise, justifiée par la nature des tâches accomplies par les salariés de l’association et proportionnée au but recherché. »

  • Un contexte déterminant

Pour évaluer si une restriction à la liberté religieuse est justifiée et proportionnée, la Cour de cassation appelle les juges de fond à examiner concrètement les conditions dans lesquelles se déroule la tâche du salarié, sa mission, le public avec lequel elle est en contact, etc.

En l’espèce, les juges relèvent qu’il s’agit : « d’une association de dimension réduite, employant seulement dix-huit salariés, qui étaient ou pouvaient être en relation directe avec les enfants et leurs parents. » Autant d’éléments susceptibles, à ses yeux, de justifier l’interdiction du port du voile.

On peut toutefois se demander ce qui a pu faire modifier ainsi l’appréciation que fait la Cour de cassation du règlement intérieur, dans la mesure où aucun élément nouveau, ni en fait ni en droit, n’a bougé entre les deux décisions.

  • Ni laïcité, ni entreprise de tendance

La Cour de cassation n’a pas cédé à la revendication d’élargir le principe de laïcité au secteur de la petite enfance (au même titre que pour les activités de service public). Elle a également balayé d’un revers de la main l’autre point de droit qui faisait débat, en refusant de reconnaître à Baby Loup la qualité « d’entreprise de conviction » (ce qu'elle revendiquait et qui aurait pu justifier plus facilement, une atteinte à la liberté religieuse). Pour la Cour de cassation, Baby loup n’a pas pour objet « de promouvoir ni de défendre des convictions religieuses, politiques ou philosophiques ».

  • Portée de l’arrêt ?

Il y a fort à croire que la salariée licenciée, lancée depuis cinq ans dans la bataille judiciaire, ne s’arrêtera pas là. Maintenant que toutes les voies de recours internes ont été épuisées, il lui reste la voie européenne et un éventuel recours devant la Cour européenne des droits de l’Homme. Dans l’attente, cette décision crée une brèche dans l’atteinte à la liberté fondamentale de croire et d’exprimer ses convictions dans la sphère professionnelle.

jeudi 22 mai 2014

Temps partiel : en l’absence d’écrit la requalification en temps plein n’est plus la seule piste

 

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Dans une décision rendue le 30 avril dernier, la Cour de cassation est venue préciser qu’en cas d’emploi à temps partiel, sans contrat écrit, avec des temps de travail variant d’un mois à l’autre, le salarié peut obtenir au choix : la requalification en temps complet ou la reconnaissance d’un contrat à temps partiel avec une durée de travail actualisée. Cass. Soc., 30.04.14, n°12-21.041.

Dans cette affaire, une salariée a été embauchée durant plusieurs mois dans une maison de retraite. Pendant les deux premiers mois, elle a travaillé 82 h/ mois, puis sa durée de travail a varié chaque mois entre 10,5 h à 68,5 h, avant qu’elle ne soit engagée en CDI à temps complet. Elle a finalement pris acte de la rupture de son contrat de travail aux motifs de manquements graves de la part de son employeur.

La salariée réclame aujourd’hui un rappel de salaires sur cette période, non pas sur la base d’un temps plein, mais sur la base d’un emploi à temps partiel de 82h/mois.

Cette demande peut paraître étonnante car habituellement, les salariés demandent la requalification de leur contrat en contrat de travail à temps complet. En effet, en l’absence de contrat écrit, la Cour de cassation reconnaît qu’il existe une présomption de contrat à temps complet. Cette présomption peut être renversée si l’employeur est en capacité d’apporter des éléments de preuve.

Ici la salariée a préféré solliciter le paiement d’un rappel de salaires sur la base de 82 h/mois dans le cadre de son contrat à temps partiel et la Cour de cassation l’a suivie en considérant que la salariée a le choix de sa demande.

S’il peut paraître surprenant que la salariée choisisse cette voie, cela se comprend car, en l’espèce, l’employeur était en capacité d’apporter la preuve des heures réellement accomplies sur toute la période par la salariée. Il aurait aisément pu prouver que la salariée n’effectuait pas un temps plein. Ces preuves mettaient en péril la demande de requalification en temps complet, ainsi que toute demande de rappel de salaires. La salariée a donc opté pour la prudence en demandant un rappel de salaires sur la base du temps partiel réellement effectué.

Il ressort donc de cette décision que le salarié peut obtenir la requalification de son contrat à temps partiel en autre contrat à temps partiel, mais sur la base d’un temps de travail plus élevé. Ce qui permet aux salariés qui ne pourraient pas obtenir de requalification de leur contrat  en temps complet (faute de preuve) de solliciter tout de même le paiement des heures effectuées.